Le combat d'Henry Fleming
Une BD de
Steve Cuzor
chez Dupuis
(Aire Libre)
- 2024
Cuzor, Steve
(Scénario)
Cuzor, Steve
(Dessin)
Versaevel, Meephe
(Couleurs)
Cuzor, Tom
(Autres)
Bocquet, José-Louis
(Préface)
Crane, Stephen
(Adapté de)
02/2024 (09 février 2024) 124 pages 9791034752485 Grand format 489745
Et vous ? Quel genre de types êtes-vous pour foncer têtes baissées vers votre propre tombeau ? Des surhommes magnifiques ou des abrutis inconscients ? » Printemps 1863. Sur les rives du Rappahanock, État de Virginie, 190 000 soldats américains s'affrontent dans le chaos mortifère d'une guerre civile fratricide. Les uns portent l'uniforme gris, les autres sont en uniforme bleu. Parmi ces derniers, le jeune Henry Fleming monte sur la ligne de front pour la première fois. Désormais, la frontière entre la vie et la mort ne tient qu'à la trajectoire... Lire la suite
Même sans avoir lu « Red badge of courage » de Stephen Crane, duquel est tiré cet album, on sent intuitivement qu’il s’agit d’un livre important. Une vision de la guerre radicale s’y déploie à travers les yeux d’Henry Fleming, un jeune fermier engagé volontaire en 1863. Sur un temps très court, deux ou trois jours seulement passés sur un champ de bataille, sa vie sera irrémédiablement changée.
Deux ou trois jours qui suffisent pour comprendre toute l’horreur de la guerre, mais aussi toute son absurdité, son injustice, son aberration.
Je comprends mille fois que Steve Cuzor ait souhaité adapter ce roman. En termes de narration il est probablement très bien transposé mais l’exercice a dû être sacrément difficile. Car ce qui se décrit en mots peut avoir plus de mal à se traduire en images. Avec une seule unité de temps, de lieu et d’action, c’est loin d’être évident. D’autant que tous les personnages se ressemblent, uniforme oblige.
Heureusement, le dessin est d’une intensité rare et nous immerge avec force au cœur des combats. Celui qui se déroule à l’extérieur, avec son lot de ravages, de mort et de destruction. Mais surtout celui qui se déroule à l’intérieur du jeune Fleming. Par le biais de nombreux récitatifs, le héros nous adresse ses pensées. Steve Cuzor nous fait écouter sa voix plus qu’il ne nous la fait lire. La voix entêtante d’un adolescent que la violence transforme en homme. Cette voix qui rend compte de l’évolution permanente de son état d’esprit et de sa lutte contre lui-même. Car finalement, le pire ennemi qu’il aura à vaincre pour survivre ne sera pas l’adversaire dans le camp d’en face, mais sa propre peur.
« Cinq branches de coton noir » m’avait ébloui en version N&B. J’ai donc pris « Le combat d’Henry Fleming » dans la même édition et je ne le regrette absolument pas.
Cet opus est une proposition différente, moins ample c’est vrai, moins romanesque et plus âpre que le précédent, mais il s’en dégage puissance et intelligence. Un album graphiquement exceptionnel, porteur de sens et de réflexion.
L'adaptation du roman de Stephen Crane est libre, mais respecte assez l'idée. Le dessin n'est pas toujours à la hauteur, parfois des planches très fortes et parfois un dessin un peu bâclé. Le parti pris du bicolore n'est pas trop judicieux, noir sur fond vert, jaune, bleu, n'apporte pas grand chose. Est-ce un procédé de gain de temps ? J'attends la version noir et blanc pour comparer. Un bon album certes, mais j'attendais beaucoup mieux, il y avait mieux à faire. D'autre part, certaines scènes sont un peu répétitives.